Défaite 6-1 du PSG face au Barça : le syndrome Doug Sanders a encore frappé !

Picture of Dorian Martinez
Comment définir le match qui vient de qualifier le Barça pour un dixième quart de finale consécutif en ligue des champions

Pour évoquer cette fantastique « remontada » catalane les supporters marseillais parlent volontiers de « Déglingada » tant le supplice des joueurs parisiens a pu leur faire plaisir.

Pour ma part, je préfère parler de « syndrome Doug Sanders »…

Golf.

1970.

British Open.

Dernier trou du parcours.

L’américain Doug Sanders est à 60 centimètres de remporter son premier Majeur. Un putt insignifiant. Tout le monde est sûr qu’il va remporter la plus belle victoire de sa carrière. Même un débutant pourrait réussir ce coup. Une formalité pour un professionnel.

Puis, le temps semble se figer.

Sanders analyse le terrain de tous les côtés.

En fait, le temps n’est pas figé. Il passe. Il est long.

Suffisamment long pour que la petite voix intérieure du joueur commence à lui raconter la fin de l’histoire. Problème. La fin de l’histoire il faut encore la réaliser. Il faut le jouer ce putt…

Sanders le jouera.

Il le ratera.

Et jamais, durant sa carrière il ne remportera un Majeur.
(Jack Nicklaus le battra le lendemain en play-off).

Tous les golfeurs connaissent ce genre de moment pour l’avoir vécu. Ce moment où le dialogue intérieur commence à prendre le dessus. Ce moment où les pensées projettent le joueur vers un futur qui n’existe pas. Ce moment où la petite voix avec un accent sadique vous rappelle un passé souvent lourd de sens.

Mais à qui donc s’adresse cette petite voix très bavarde ?

Au corps.

Mince.

Le corps ne peut comprendre que le temps présent.

Il est câblé ainsi.

Il est bien incapable de répondre à une projection trop lointaine vers un futur hypothétique ou répondre à un souvenir figé dans le passé.

Il ne sait pas faire.

Ça le stresse.

Pour le corps, se projeter trop loin revient à conduire une voiture en regardant le rétroviseur ou un écran montrant la route 10 kilomètres plus loin.

Impossible.

Alors, dans le présent, le corps se crispe.

Les pensées projectives l’empoisonnent.

Le corps n’est plus performant.

Il fait une sortie de route…

Ce geste simplissime, Sanders l’a pourtant réussi des milliers de fois.

Sans se poser de questions, il pourrait même le réaliser les yeux fermés.

Mais ce jour là, à cet instant précis, au moment crucial, juste avant de jouer, son cerveau à implosé. Ses pensées n’étaient plus en phase avec le jeu. Plus en phase avec le moment.

Immersion.

Je me suis demandé vers quel côté de la foule j’allais me tourner pour célébrer ma victoire. J’avais préparé mon discours de vainqueur avant la fin de la bataille.
Doug Sanders

 

Hier soir, c’est ce qu’ont vécu les joueurs du PSG.

Ils n’ont pas joué.

Ils ont beaucoup pensé.

Ils se sont tétanisés.

Ils ont implosé.

Ils ont vécu ce que j’appelle le « syndrome de Sanders ».

Rappelons d’abord qu’un syndrome se définit comme un ensemble de signes, de comportements qui révèlent, manifestent un état d’esprit, une manière de penser, une certaine manière d’agir que présente une personne, un groupe, une collectivité.

Aussi, pour théoriser ce phénomène récurant en psychologie sportive, je propose la définition suivante :

Le syndrome de Sanders est un processus psychologique qui vient parasiter l’accès à la performance d’un individu ou d’une équipe.

Ce syndrome se manifeste par une activité mentale intense qui rend le sportif spectateur de pensées scénarisées faisant référence à une histoire passée ou à un futur fantasmé.

Spectateur du film qui se passe dans sa tête, le sportif n’est plus pleinement acteur de l’évènement qui se joue dans le moment présent.

Il n’arrive alors plus à mobiliser les ressources nécessaires de détachement émotionnel et de focalisation sur la tâche à accomplir, conditions clés pour permettre au corps d’exprimer ce qu’il a pourtant l’habitude de réaliser facilement et naturellement. 

L’intensité et/ou la répétition de ce syndrome peut ancrer un traumatisme durable chez les sportifs et les équipes qui le subissent.

Quand les joueurs éprouvent ce traumatisme, il devient très difficile pour eux de trouver les explications. Après coup, ils se retrouvent souvent dans un semi brouillard. Sans repères. Perdus entre la réalité objective des faits et les sensations confuses de leur vécu.

Témoignages :

C’est vraiment difficile d’expliquer… A 3-1 les Barcelonais nous ont dit que c’était fini…
Marco Verratti
Je n’arrive pas à l’expliquer, je ne comprends pas, ça met un coup au moral…
Adrien Rabiot
Je n’ai rien compris, ça a été tellement vite.
Hatem Ben Arfa
C’est difficile de trouver des explications. Le Barça a joué son va-tout, et nous on s’est laissé dominer.
Thomas Meunier
Je n’arrive pas à croire à ce qu’il s’est passé.
Nasser Al-Khelaïfi

Dans un sport collectif, ce syndrome possède une puissance virale phénoménale. Il suffit d’un fait de jeu, d’un contexte, d’une situation et de quelques joueurs particulièrement sensibles (et mal préparés) pour que le phénomène s’empare de l’équipe toute entière…

C’est exactement ce qui s’est passé hier.

Les joueurs parisiens n’ont pas évolué à leur niveau. Ils n’ont pas su stopper la dynamique de confiance des barcelonais. Individuellement, chaque joueur a rendu une prestation technique très largement en dessous de son niveau moyen.

Durant les 10 dernières minutes du match les joueurs parisiens n’ont réussit qu’une seule passe. À elle seule, cette statistique illustre la fébrilité du PSG.

Un club ambitieux comme le PSG ne peut plus considérer qu’il s’agit d’un manque de chance, d’un manque d’expérience ou d’un manque d’argent.

Non, il s’agit d’un manque de professionnalisme sur la gestion psychologique des joueurs.

Quand on ne dépasse jamais les quarts de finales depuis plusieurs années.

Cela situe le niveau réel du PSG.

Si le PSG souhaite franchir un cap, il doit impérativement s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue.

Il doit améliorer son système, sa matrice psychologique.

Ce n’est pas en changeant à nouveau d’entraîneur qu’il trouvera la solution. Le problème n’est pas tactique. Les joueurs, eux-mêmes, expliquent que les consignes étaient claires et acceptées. Elles n’ont pas pu être appliquées. A cause d’un blocage. C’est différent. Et personne dans le club ne semble avoir d’explications…

Sans analyse ni audit, il y a des évidences qui sautent déjà aux yeux.

L’équipe doit générer un leader de terrain. Pas besoin d’en acheter un. Il existe déjà dans le groupe. Il ne le sait pas lui-même.

L’équipe doit s’appuyer sur son identité et ses valeurs pour créer sa propre culture. C’est un travail précis et méthodique qui doit être entrepris.

Enfin, les individualités doivent pouvoir exprimer leur meilleur niveau pendant les événements majeurs. Sous forte pression.Cela signifie qu’un travail sur la gestion mentale et corporelle doit être entrepris.

Pour jouer, il faut se concentrer sur le jeu.

Pas sur l’enjeu.

Il ne suffit pas de le dire pour que cela se produise.

Ça se travaille.

Et Doug Sanders dans tout ça ?

Il est toujours en vie.

Il a 83 ans.

Après toutes ces années, peut-on se remettre d’un putt raté ?

Oui, parfois, il m’arrive de ne pas y penser pendant au moins cinq minutes… Si je le pouvais, j’échangerais toutes les victoires de ma carrière contre ce titre-là.
Doug Sanders

 

L’absence de travail sur soi dans le sport se paie toujours cher.
Toujours très cher.

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